Zoom sur la station Arvalis de Châlons-en-Champagne
La station Arvalis de Châlons-en-Champagne côtoie un environnement industriel riche et diversifié. Elle structure ses activités de recherche pour répondre aux exigences de technicité des acteurs locaux, et pour apporter des références agronomiques locales dans un contexte pédologique atypique. Reportage.
Le secteur champenois, du fait de son sol crayeux, est un excellent de terrain de jeu pour acquérir des références sur la nutrition azotée. La station Arvalis de Châlons-en-Champagne y consacre une bonne partie de son programme d’activité.
Si le vignoble contribue largement au rayonnement mondial de la Champagne, la région se démarque aussi pour son incroyable abondance d’industries de première transformation : moulins, amidonneries, malteries, sucreries, déshydratation (luzerne), chimie verte. Sous l’impulsion des coopératives1 et des agriculteurs, le paysage agricole s’est donc structuré pour répondre à la demande des industriels, favorisant la diversification des exploitations agricoles. « On est implantés dans un environnement agricole très technique », plante Mélanie Franche, ingénieure et responsable de la station Arvalis de Châlons-en-Champagne.
Un type de sol unique en France
La production agricole est répartie sur deux grands secteurs aux caractéristiques pédologiques bien distinctes : la Champagne crayeuse et le Barrois. Ces particularités orientent les travaux de la station de Châlons-en-Champagne. « La craie est un sol facile à travailler, ayant une bonne réserve hydrique, et elle offre la possibilité de cultures diversifiées, industrielles, et de beaux potentiels de rendements, autour de 90-100 q/ha sur blé. Toutefois, ses teneurs en matières organiques globalement modérée et ses capacités de minéralisation limitées rendent un tel sol fortement dépendant des intrants azotés », explique Mélanie Franche. Le secteur champenois est donc un terrain de jeu idéal pour acquérir des références sur la nutrition azotée des plantes (dose, fractionnement, pilotage), et plus globalement sur la fertilité des sols.
C’est dans cet objectif que le projet CP-LEG, à travers l’Association Régionale pour l’étude des Productions végétales en Champagne crayeuse2 (AREP), dont Arvalis est maître d’œuvre, est né. « L’objectif était d’évaluer l’impact de couverts permanents de légumineuses sur les performances agronomiques du colza, du blé, de l’orge de printemps et de la betterave. Et de poser un diagnostic sur le risque de transfert de nitrates vers les eaux souterraines », expose Mélanie Franche. Après six ans d’essais, des réponses émergent. « Un couvert de trèfle est implanté dans le colza et détruit 1, 2 ou 3 ans après. L’essai montre, entre autres, que l’implantation d’un couvert permanent n’est pas simple, que sa biomasse influe fortement sur la productivité des cultures suivantes (concurrence parfois significative), et que des arrières-effets peuvent se voir jusqu’à deux ans après sa destruction. Toutefois, la destruction d’un couvert un mois avant l’implantation d’une orge de printemps maximise l’effet de l’azote sur la culture sans engendrer de risque sur la qualité de l’eau », développe l’ingénieure.
Une station portée sur l’événementiel
L’événementiel fait partie intégrante de la culture d’Arvalis pour assurer le transfert des connaissances de l’institut aux agriculteurs et techniciens, et la station de Châlons-en-Champagne ajoute régulièrement sa pierre à l’édifice. À deux reprises (en 2017 puis en 2021), la station a accueilli le salon aux champs « Les Culturales ». Les équipes de la station contribuent également de près ou de loin à l’organisation du colloque annuel Orges brassicoles, ainsi qu’aux colloques « Forum Blé Tendre », organisés chaque année dans l’un des cinq bassins de production de la culture (Saône-Rhône, Sud-Ouest, Océan Centre-Ouest, Nord Seine Normandie et Cœur de France).
Cultiver les partenariats
Sur le secteur du Barrois, les sols superficiels et caillouteux offrent un potentiel de rendement limité à 50-70 q/ha en blé. « Les rotations sont beaucoup moins diversifiées qu’en champagne crayeuse. On accompagne plus spécifiquement les agriculteurs sur le désherbage, la maîtrise du vulpin et du ray-grass se montrant de plus en plus délicate avec le développement de l’agriculture de conservation dans ce secteur », relate Mélanie Franche. L’impact du changement climatique y est également plus présent, d’où des acquisitions de références spécifiquement sur ce thème.
La station de Châlons-en-Champagne cultive ses partenariats avec l’écosystème agricole local, au travers de protocoles sur l’évaluation variétale, la lutte contre les maladies, l’implantation des couverts ou encore les stratégies de fertilisation azotée. « Chaque coopérative, négoce ou chambre d’agriculture a un référent chez Arvalis. Nous sommes continuellement en contact pour des questions en cours de campagne, ou travailler sur des protocoles d’essais communs. Cela permet de multiplier les sources pour l’acquisition de références et d’échanger entre experts », commente Raphaël Raverdy, ingénieur régional. Parfois, ces relations prennent une tournure officielle, à l’image de l’accord-cadre de coopération signé entre Arvalis et Vivescia en juin 2024.
Des liens qui s’entretiennent aussi grâce à l’animation de deux filières - Orges brassicoles et Blé tendre - par les ingénieurs de la station. Une localisation qui fait sens puisque la Champagne-Ardenne concentre 30 % des surfaces nationales d’orge de printemps, et 10 % de celles de blé tendre et d’orge d’hiver. « Notre rôle est d’écouter les acteurs des filières à l’échelle nationale, y compris de l’aval, pour orienter le programme d’activité d’Arvalis en fonction des priorités », explique Alexis Decarrier, ingénieur et animateur de la filière Blé tendre.
Des essais précurseurs sur le phénotypage
Enfin, la station de Châlons-en-Champagne est à l’origine du développement de certaines innovations désormais normalisées au sein de l’institut. « On est précurseur sur le phénotypage : c’est ici que le prototype de l’arche Aplhi a été finalisé », signale Lionel Igier, technicien. Aujourd’hui, Alphi en est à sa troisième version, et est utilisée sur la station de Villers-Saint-Christophe.
(1) Trois des plus grands collecteurs français sont installés en Champagne-Ardenne : Soufflet, Vivescia et Cérésia.
(2) L’AREP est une association fondée en 1976 qui rassemble 9 partenaires : Arvalis, l’ITB, Terres Inovia, la Fédération régionale des coopératives agricoles Grand-Est, Cristal Union, Téréos, Soufflet ainsi que les Chambres départementales d’agriculture des Ardennes, de la Marne et et de la Haute-Marne.
La station Arvalis de Châlons-en-champagne
• Localisation : Châlons-en-Champagne (51)
• Création : 2001
• Surface : essais en parcelles d’agriculteurs uniquement
• Salariés permanents : 9
• Système : polyculture
• Activités : nutrition azotée, fertilité des sols, couverts végétaux, céréales à paille, variétés, ravageurs, maladies, animation filières Blé tendre et Orges brassicoles.
La station de Châlons-en-Champagne compte quatre ingénieurs, dont deux animateurs filières, quatre techniciens et une assistante.
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