Ne pas se laisser déborder par le chardon

De nombreux signalements de chardons nous sont remontés cette année. C’est l’occasion de rappeler les bons réflexes pour gérer cette vivace.

Le chardon (Cirsium arvense) a un pouvoir de dissémination important : il peut produire jusqu’à 1 500 graines par pied, facilement transportées par le vent. Mais, moins de 5 % des chardons sont issus d’une reproduction sexuée. Sa nuisibilité provient principalement d’une reproduction végétative, par la production de drageons (pousses racinaires) et de rhizomes qui vont lui permettre de rapidement coloniser le milieu. Par exemple, une étude a montré qu’un chardon pouvait coloniser 250 m2 en trois ans par cette voie végétative.

Comme de nombreuses vivaces, le chardon constitue des réserves racinaires jusqu’à la fin de l’été afin de passer l’automne et l’hiver. En sortie d’hiver, ses réserves sont au plus bas ainsi qu’à la fin du printemps/début d’été (production de graines). Ces périodes sont optimales pour intervenir (3-4 passages d’outils) avant l’entrée en dormance du chardon en novembre.

Les déchaumages répétés à l'interculture, avec un recouvrement maximal, s'avèrent être la meilleure stratégie

L’un des facteurs clés dans la gestion du chardon est l’utilisation d’outils permettant de travailler en plein. L’objectif est d’épuiser les pousses souterraines des chardons. Avec des outils ne permettant pas un recouvrement suffisant, certains drageons passent au travers du travail du sol et poursuivent alors leur expansion.

Plusieurs interventions à 6-10 cm de profondeur au stade 5-8 feuilles avec des outils permettant de sectionner les organes végétatifs permettent d’épuiser la vivace. Un temps sec après le travail du sol optimisera l’efficacité.

Cependant, la lutte mécanique n’est pas aisée sur cette adventice. De part sa biologie (organes souterrains profonds), le labour a une efficacité limitée sur chardon. La fauche des pousses n’est efficace que si elle est réalisée après le stade « boutons floraux », en empêchant la montée à graine. Attention, avant ce stade, une fauche sera préjudiciable : elle va provoquer une levée de la dominance apicale, engendrant l’émergence d’une multitude de plantules issues des bourgeons racinaires, qui faciliteront l’expansion de la plante.

A noter que le semis direct, dans la mesure où il ne perturbe pas le système racinaire, va permettre aux organes multiplicateurs de s’étendre, sans aucun frein.

Bâtir une rotation propice aux fenêtres d’interventions

Contre les vivaces, il est important de combiner les méthodes de lutte pour épuiser au maximum ces adventices. Dans ce cadre, la rotation n'est cependant pas un levier très puissant dans la gestion du chardon, à l'exception de la luzerne. Cette légumineuse, grâce à sa présence sur 3 ans et la pratique de fauches, est une plante d'intérêt, mais elle n'empêche pas la réapparition du chardon trois ans après sa destruction en moyenne. Les cultures de la rotation peuvent cependant être choisies de manière à élargir les possibilités de lutte herbicide et/ou mécanique, binage notamment. Dans ce cadre, un escourgeon semé tôt et récolté également précocement permettra par exemple d’intervenir mécaniquement dès le début de l’été.

Les conditions à réunir pour des interventions mécaniques efficaces sur chardons

1. Intervenir au moment où les réserves racinaires sont au plus bas (sortie d’hiver ou fin du printemps/début d’été) -> stade 5-8 feuilles du chardon
2. Utiliser des outils avec le maximum de recouvrement (> 30 %) -> ailettes
3. Intervenir par temps sec et chaud
4. Combiner avec des cultures étouffantes ou permettant d’intervenir au bon moment -> luzerne, escourgeon
Et, comme pour toutes les adventices, l'intervention dès les premières apparitions du chardon limite sa prolifération et donne les meilleurs résultats.

Quid des applications herbicides ?

La stratégie chimique est un levier supplémentaire. La période optimale pour une application herbicide se situe au stade « boutons floraux » du chardon (aux environs du stade 2 nœuds du blé tendre), doublée d’une intervention à l’interculture.

Au stade boutons floraux, la sève élaborée circule des parties végétatives vers les organes souterrains ; l’herbicide étant également transporté, il pourra détruire la partie souterraine. À l’interculture, le chardon, sectionné par la coupe de la moissonneuse, sera reparti en végétation. Cette masse foliaire va faciliter la pénétration du produit dans la plante. Le plus important est d’intervenir sur plusieurs années afin de contrôler durablement le chardon. Il est possible de rajouter du 2,4 D au glyphosate dans la lutte en interculture, à raison de 800 g/ha. Attention cependant au délai avant l’implantation de la culture suivante pour cette substance active.

L’utilisation du glyphosate est évidemment soumise à la nouvelle réglementation en vigueur. Pour une interculture avant l’implantation d’une culture d’automne, le glyphosate, hors lutte obligatoire, n’est possible que sur une parcelle non labourée et à une dose maximale de 1080 g/ha par an. Avant l’implantation d’une culture de printemps, la même règle s’applique avec cependant une possibilité supplémentaire pour une application d’été ou de début d’automne en parcelle labourée si on est en présence d’un sol hydromorphe.

En fonction des cultures, les stades d’application peuvent être différents : sur blé, jusqu’au stade 2 nœuds (avec un produit à base de clopyralid) et jusqu’au stade dernière feuille étalée (metsulfuron et spécialités Chardex/Effigo). Sur maïs, la lutte peut s’envisager avec une application de Lontrel-100 + huile ou bien avec un herbicide à base de dérivé auxinique, avant le stade 6 feuilles du maïs.

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