Besoins en eau : combien consomment les cultures ?

L’eau est un élément majeur de la production agricole. L’importance de connaître les besoins en eau adaptés à chaque culture est un enjeu fort, tout comme savoir ce que l’on gagne à irriguer.
Contrairement à ce que souffle le sens commun, en l’absence de stress hydrique, le maïs ne consomme pas tellement plus d’eau (500 mm en moyenne) que le blé (435 mm en moyenne).

Quand il est question d’estimer la consommation totale en eau des cultures, il faut prendre en compte l’eau de toute origine : les pluies, les irrigations et l’eau contenue dans le sol.

La consommation d’eau à l’échelle d’une parcelle varie selon le rendement de celle-ci. C’est pourquoi on préfère souvent parler d’efficience de l’eau, soit le nombre de quintaux produits par millimètre d’eau consommé, plutôt que de consommation brute.
Il sera néanmoins avant tout question dans cet article de consommation, qu’il faudra bien évidemment mettre en regard de la production de chaque espèce.

Pour mesurer cette consommation, deux approches peuvent être mises en œuvre : la modélisation ou une approche expérimentale utilisant des capteurs d’estimation de l’eau du sol.

Comment modélise-t-on des besoins en eau ?

Les références indiquées ci-après sont issues du modèle Irré-LIS, outil d’Arvalis qui fait le bilan entre les entrées et les sorties d’eau du sol (figure 1).

Figure 1 : Facteurs pouvant influer sur le stock d’eau du sol entre le jour j-1 et le jour j.
Facteurs pouvant influer sur le stock d’eau du sol entre le jour j-1 et le jour j.
Entrées d’eau en bleu ; sorties en rouge.

C’est un modèle à deux réservoirs : le sol est partagé en un réservoir utile racinaire et un réservoir utile sous-racinaire. Il prend donc en compte la croissance des racines au fur et à mesure du cycle et considère que le réservoir utile accessible à la plante en début de cycle est inférieur à celui en fin de cycle (figure 2).

Figure 2 : Fonctionnement schématique du modèle Irré-LIS
Fonctionnement schématique du modèle Irré-LIS.
À gauche, situation en début de cycle de la culture ; à droite, situation plus avancée dans ce cycle : les besoins en eau sont accrus car la plante s’est développée mais elle a également accès à un plus gros réservoir utile. RSr : réservoir de survie racinaire ; RSsr : réservoir de survie sous-racinaire ; RFUr : réservoir facilement utilisable racinaire ; RFUsr : réservoir facilement utilisable sous-racinaire ; LAI (leaf area index) : indice de surface foliaire ; Kc : coefficient cultural. ETR : évapotranspiration réelle. Copyright : Irré-LIS ®.

Les données d’entrée du modèle sont la localisation de la parcelle (données météorologiques), la culture, la variété, la date de semis ou de plantation et le type de sol (qui précise la valeur du réservoir utile).

La consommation d’eau est estimée à partir de la demande climatique, à savoir l’évapotranspiration potentielle (ETP), et du coefficient cultural Kc, dont les valeurs varient en fonction des stades de développement de la culture.

La consommation en eau de la plante est définie pour une culture ne subissant aucun stress hydrique : c’est l’évapotranspiration maximale pour chaque culture entre le semis et le stade le plus proche de la récolte (tableau 1).

Tableau 1 : Stades entre lesquels l’évapotranspiration maximale est calculée, selon la culture.

En pratique, ce sont des conditions assez rares ; en effet, en parcelles non irriguées, les phénomènes de stress hydriques sont assez fréquents, quelle que soit la culture. Même les parcelles irriguées sont susceptibles de subir des stress hydriques, notamment en raison de contraintes liées au volume d’irrigation disponible ou bien au débit d’équipement (encadré).

Irrigation n’est pas synonyme d’absence de stress hydrique

Le débit d’équipement d’irrigation ne permet pas toujours de couvrir les besoins en eau lors d’années climatiques extrêmes. En effet, le dimensionnement d’une installation d’irrigation en grandes cultures se base sur le nombre de millimètres par jour d’irrigation nécessaires pour bien irriguer sa culture. La valeur prise en général est le huitième décile du mois le plus exigeant de la culture sélectionnée. Cela signifie toutefois que deux années sur dix, il ne sera pas possible de couvrir la totalité des besoins en eau de la plante.

Des consommations en eau équivalentes entre blé tendre et blé dur

Pour chaque culture, des cas-types ont été définis ; ils se basent sur les pratiques actuelles des agriculteurs selon le lieu de production, la date d’implantation ou encore la précocité de la variété cultivée. Plusieurs variétés couplées à plusieurs dates de semis sous différents climats ont été modélisées. Les calculs de consommation d’eau ont été faits sur 20 ans, entre 2004 et 2023. Les résultats sont exprimés en millimètres d’eau ; 1 mm équivaut à 10 m3/ha.

Il n’y a pas de différence marquée entre les calculs réalisés pour le blé tendre et le blé dur. Semés en hiver, ils ont tous les deux une consommation d’eau sur l’ensemble de leur cycle qui varie entre 350 et 500 mm selon les cas-types, pour une moyenne de 435 mm, quand ils ne subissent aucun stress hydrique au cours de leur cycle.

L’orge de printemps, qui a un cycle plus court, consomme en moyenne 280 mm, avec des valeurs oscillant entre 220 et 350 mm.
Le maïs a une consommation d’eau totale variable, comprise entre 450 et 600 mm. La consommation moyenne calculée sur l’ensemble des cas-types est de 500 mm.
Le sorgho a une consommation en eau équivalente au blé, en moyenne de 415 mm et comprise entre 350 et 500 mm.
Les résultats concernant la pomme de terre sont très variables selon les cas-types ; ils s’étagent entre 300 et 500 mm, avec une moyenne de consommation à 360 mm.
Il est important de noter que le modèle « Stade de la pomme de terre » est calculé en nombre de jours, ce qui peut fausser partiellement les résultats par la non prise en compte de l’accélération potentielle du cycle de la culture les années chaudes et de son ralentissement les années plus fraîches. Les modèles d’estimation des stades physiologiques de toutes les autres cultures de cet article sont basés sur des sommes de températures, ce qui permet d’avoir une variabilité dans la durée du cycle cultural.

Et qu’en est-il de leur efficience de l’eau ?

Les cas-types étudiés ne permettent pas d’aller jusqu’à l’efficience de l’eau car le rendement n’est pas une donnée de sortie du modèle Irré-LIS. Mais c’est bien l’efficience, plus que la consommation globale, qui est importante pour les cultures lorsqu’il s’agit notamment de prioriser l’allocation de la ressource en eau dans son assolement.

Des essais Arvalis dans plusieurs régions de France, englobant un large éventail de dates de semis, de variétés et d’années, ont permis d’avoir des estimations de l’efficience de l’eau d’irrigation, et non plus une estimation de la consommation totale comme précédemment.

Pour les céréales à paille (orge de printemps, blé dur, blé tendre), un réseau sec/irrigué en Poitou Charentes (17) a permis d’évaluer l’efficience de l’eau d’irrigation à environ 2 à 2,5 q/ha pour 10 mm apportés. Plus précisément, elle est de 2,5 q/ha/10 mm pour le blé tendre, entre 2 et 3 q/ha/10 mm pour le blé dur, et à environ 2 q/ha/10 mm pour l’orge de printemps.

Pour le maïs, les valeurs relevées dans les différents observatoire sec/irrigués sont comprises entre 3 et 4 q/ha/10 mm. Les valeurs sont équivalentes en sorgho.

Enfin, concernant la pomme de terre, les différents essais ont montré une efficience comprise entre 6 et 8 q/ha/10 mm (soit 0,6 à 0,8 t/ha/10 mm).

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