Marché du blé tendre : un cap difficile à passer
La production hexagonale de blé tendre est revenue à la normale mais le marché est déprimé. La production mondiale affiche un record, la concurrence est vive et l’offre française s'avère pénalisée par la parité euro-dollar.

Les voyants du marché du blé tendre sont au rouge. Et, sauf incident, ils devraient le rester sur la campagne 2025/26. Alors certes, la production française s’élève à 33,4 millions de tonnes (Mt), et il faut s’en réjouir. C’est 30 % de plus que la précédente récolte. Mais c’est oublier que la récolte 2024 était catastrophique. « Par rapport à la moyenne olympique 2017-2023, la production 2025 reste inférieure de 4,5 % », détaillait Sébastien Poncelet, d’Argus Média, le 28 août dernier en conférence de presse à Paris.
Plus de volume mais moins de débouchés
Les rendements sont plutôt bons (74,4 q/ha), mais la sole de blé tendre s’avère être la 3e plus faible depuis 20 ans. Et Argus Média confirme pour l’avenir cette dynamique baissière des surfaces. « Pour la récolte 2026, nous pensons que les surfaces ne dépasseront pas 4,8 millions d’hectares. »
Pire, en 2025-26, les exportations de blé français devraient rester timides, « autour de 8 Mt, alors que nous pourrions exporter 9 à 10 Mt », indique Alexandre Willekens d’Argus Média.
En parallèle, les stocks de reports atteindront 4 Mt. Un constat qui résulte de la perte du débouché historique algérien et de l’absence d’achats chinois cette année, lesquels ne seront pas compensés par les achats marocains annoncés.
Figure 1 : Évolution des exportations françaises de blé tendre (en millions de tonnes) vers les pays tiers

Sur les marchés, le blé français pâtit de la hausse de la parité euro/dollar (€/$). La tonne de blé a perdu 15 $ entre janvier et août 2025, alors que la perte se chiffre à 40 €/t. Un repli uniquement causé par la hausse de la parité.
Vers une production mondiale record en 2025
Autre facteur : des conditions de culture confortables chez nos concurrents à l’export, qui génèrent d’importants volumes de production et constituent autant d’offres concurrentes à la nôtre. La production est bonne partout, et les stocks mondiaux de blé tendre s’accumulent, quand la demande reste stable. « Pour la première fois, la production cumulée des huit principaux exportateurs mondiaux de blé devrait, sauf catastrophe, dépasser les 400 Mt », indique Alexandre Willekens. En Europe, la production est d’un bon niveau (152 Mt). Même chose en Mer noire, où la production est à nouveau en hausse (86,1 Mt en Russie, 21,9 Mt en Ukraine). Dans l’hémisphère Sud (Argentine, Australie), les disponibilités en blé dépassent les 60 Mt. Argus estime la production australienne à 32,6 Mt et à 19,7 Mt en Argentine.
La production de maïs bat également des records et ne permettra pas un rééquilibrage des marchés. Si en Europe, les volumes sont attendus au plus bas depuis 15 ans, le niveau de production s’annonce historique aux États-Unis (412 Mt).
En France, il manque 30 €/t pour couvrir la totalité des charges de l’exploitation agricole.
Dans ces conditions, en France, c’est la déprime : le prix du blé meunier s’établissait à 193,5 €/t base juillet rendu Rouen, bien inférieur aux coûts de production. « Il manque 30 €/t pour couvrir la totalité des charges de l’exploitation agricole », constate Gautier Le Molgat, PDG d’Argus Média France. « Un sursaut de la demande, une rétention des producteurs, un mouvement sur les devises, ou un accident météo pourraient ramener de la volatilité. »
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