Molluscicides : les produits de biocontrôle à la loupe
Le marché des produits antilimaces évolue rapidement et les spécialités à base de phosphate ferrique se multiplient. Le prix n’étant plus un élément discriminant entre solutions à base de métaldéhyde ou de phosphate ferrique, quels produits choisir ?

Ces dernières années, peu de gros dégâts liés à des attaques de limaces ont été signalés, ce qui peut s’expliquer par des conditions climatiques a priori peu favorables à leur développement et aux attaques sur céréales (températures estivales élevées et faible hygrométrie). Néanmoins, la limace grise Deroceras reticulatum reste un ravageur potentiellement très dommageable en grandes cultures, surtout lorsque les attaques surviennent en début de cycle, pendant la période de sensibilité de la culture (du semis au stade 3-4 feuilles pour le blé).
Les produits à base de phosphate ferrique en plein essor
Un des leviers de lutte efficace reste l’utilisation de solutions molluscicides. Actuellement, seules deux substances actives (SA) sont homologuées et disponibles sur le marché : le métaldéhyde et le phosphate ferrique, qui est une substance naturelle. Or, depuis janvier 2021, le métaldéhyde est sujet à redevance pour pollution diffuse (9 €/kg de SA) et les produits concentrés à 3 % ou plus sont désormais classés CMR2 (encadré 1). Cette décision de l’Agence européenne des produits chimiques a eu pour conséquence d’accélérer l’émergence sur le marché de nouveaux produits à base de phosphate ferrique (SA non sujette à ces restrictions) et de réduire les écarts de prix entre les produits comportant l’une ou l’autre de ces matières actives (encadré 2).
Dans ce contexte, et pour continuer à accompagner les agriculteurs et techniciens dans leur choix des solutions utilisées, Arvalis poursuit l’évaluation des produits molluscicides disponibles sur le marché.
Pour cela, des essais en cages sont réalisés chaque année en suivant la méthode CEB n°48 bis. Celle-ci consiste, pour chaque modalité testée, à installer 4 cages de 1 m2 contenant chacune 25 limaces grises, 4 rondelles de feuilles de salade ou de colza ainsi que des granulés anti-limaces disposés de façon homogène et à dose homologuée. Le nombre de limaces mortes ainsi que le pourcentage de surface foliaire consommée sont mesurés à intervalle régulier après mise en place de l’essai. Les rondelles de feuilles sont remplacées entre chaque notation.
Les résultats de deux essais, réalisés à Boigneville (91) en octobre 2022 et en avril 2023 sur six spécialités, montrent un gradient d’efficacité (figure 1).
Les références confirmées
Dans ces deux essais et parmi les solutions à base de phosphate ferrique, on constate une meilleure efficacité de SLUXX HP (concentré à 3 %, dose de 7 kg/ha) et de IRONMAX PRO (concentré à 2,42 %, dose de 7 kg/ha) pour les deux variables mesurées.
En termes de mortalité induite, ces deux produits présentent des efficacités comparables à J + 8/9 qui, en moyenne par rapport au témoin, sont de l’ordre de 50 %, pour IRONMAX PRO, et de 65 % pour SLUXX HP. De plus, on constate ponctuellement (en 2022 et confirmé par les résultats d’essais antérieurs), une rapidité d’action légèrement meilleure de IRONMAX PRO, bien que cette différence ne soit pas toujours significative.
Enfin, ces deux solutions permettent de réduire significativement la surface foliaire consommée, de 65 à 85 % par rapport au témoin et ce, dès 3 jours après application.
Malgré une certaine variabilité entre essais, ces observations sont cohérentes avec des résultats acquis précédemment et confirment le statut de référence de SLUXX HP et de IRONMAX PRO parmi les produits à base de phosphate ferrique (figure 2).
En revanche, on constate un gradient d’efficacité entre les autres solutions à base de phosphate ferrique récemment homologuées, avec notamment une mortalité induite des limaces moins importante. En moyenne par rapport au témoin, ULTIMUS (concentré à 3 %, dose de 7 kg/ha), NOVA SLUXX (concentré à 4,2 %, dose de 5 kg/ha) et FERREX (concentré à 2,5 %, dose de 6 kg/ha) présentent des efficacités respectives à J + 8/9 de 32 %, 26 % et 24 %. Toutefois, en termes de protection du végétal, les résultats sont comparables aux références dans au moins un des essais. Ils sont à chaque fois significativement différents du témoin dès J + 3. De nouvelles expérimentations sont prévues pendant la campagne 2024 pour confirmer ces résultats.
Protéger la culture en place
Il est important de rappeler que l’efficacité de ces solutions dépend également de la qualité de l’épandage et des conditions d’application. Le traitement doit être raisonné en fonction du niveau de risque lié à la parcelle, des conditions climatiques et de l’activité des limaces. Une surveillance régulière est donc nécessaire pour anticiper et intervenir au bon moment (encadré 3).
Le piégeage : pour épandre uniquement quand il faut
La lutte directe permet de limiter ponctuellement l'exposition des plantes aux attaques de limaces et ainsi de protéger la culture en place. Cependant, pour réguler les populations sur le long terme et réduire le risque pour les années suivantes, il est indispensable de s’appuyer également sur des leviers agronomiques tels que le roulage au semis, le déchaumage ou encore l’intégration de couverts moins appétants dans la rotation.
Depuis 2021, les molluscicides contenant 3 % ou plus de métaldéhyde doivent être stockés à part dans le local phytosanitaire et ne peuvent être mélangés avec certains traitements de semences. La réglementation assortit leur utilisation au port de gants et d’un tablier ou d’une blouse pour le chargement et le nettoyage. Si un salarié manipule ces produits, l’opération doit être déclarée comme poste à risque auprès de la MSA et son utilisation est interdite aux salariés en CDD, aux femmes enceintes et aux mineurs.
Depuis que le métaldéhyde est soumis à la RPD, les produits à base de phosphate ferrique sont d’un coût similaire (hors génériques). L’efficacité des produits de référence est comparable, avec une nuance : les appâts à base de phosphate ferrique agissent généralement moins rapidement que les antilimaces à base de métaldéhyde, d’où l’intérêt de surveiller régulièrement la parcelle pour anticiper le risque et bien positionner une éventuellement intervention.
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