Systèmes de culture : le relay-cropping, un système innovant à l’essai

L’intérêt de la technique du relay-cropping a été évalué pour la première fois en France sur une base orge/soja. Les premiers résultats montrent que la faisabilité technique ne semble pas être un frein mais que l’eau peut constituer un important facteur limitant.
Test de faisabilité Arvalis du relay-cropping soja dans orge d'hiver

Une double culture consiste à produire deux cultures de vente dans la même parcelle sur une même année culturale. Contrairement à une double culture « classique » où la deuxième culture est semée juste après la récolte de la première, avec la technique du relay-cropping, la culture d’été, ou culture relai, est implantée dans la culture d’hiver à sa période de semis normale (vers le stade « sortie des barbes » de la céréale). La culture d’été est positionnée sur des bandes de terre nue où des rangs de la culture d’hiver ont été fermés ; elle est alors semée non pas à la volée mais à l’aide d’éléments semeurs pour permettre une bonne implantation.

L’orge d’hiver est un bon candidat : elle permet à la culture d’été d’être libérée de sa concurrence plus tôt qu’avec un blé. La culture d’été ayant un cycle d’un mois et demi plus long que dans une double culture classique, il est possible de choisir une variété plus tardive, au potentiel de rendement supérieur.

En savoir plusLe suivi des essais comparatifs des trois systèmes de culture est consultable sur http://arvalis.info/16m

Mieux valoriser l’interculture

Une interculture avant culture de printemps peut être longue. Par exemple, lorsqu’un sorgho ou un soja est semé après du blé, le sol reste non valorisé neuf mois (de la récolte du blé au semis du sorgho ou du soja). Si l’agriculteur protège le sol par un couvert végétal, celui-ci répond aux exigences environnementales et agronomiques mais n’apporte pas de rentabilité directe à court terme - hormis pour les éleveurs, ou encore les agriculteurs équipés de méthaniseur. Le relay-cropping est un moyen de mieux rentabiliser ces mois d’interculture : dans cet exemple, le couvert d’interculture avant soja peut être remplacé par de l’orge d’hiver.

La réussite d’une double culture n’est pas toujours assurée. Le potentiel de rendement est plus faible qu’en culture principale en raison de la précocité des variétés choisies et la récolte peut être parfois tardive, voire impossible. La technique relay-cropping permet d’enchaîner deux cultures sans prendre trop de risques pour la récolte de la culture relai.


Une évaluation encourageante en Poitou-Charentes

Aucune évaluation scientifique des performances du relay-cropping n’ayant été faite en France, Arvalis a mis en place une étude de cette pratique en Poitou- Charentes, aidé par Terres Inovia. Les potentiels de rendement de trois systèmes de culture ont été comparés : une double culture classique (orge d’hiver puis soja précoce en dérobé), un relay-cropping orge d’hiver/soja, et un soja en culture principale précédée par un couvert. En outre, une orge d’hiver a été cultivée seule avec une architecture de peuplement de type relay-cropping afin de quantifier une éventuelle perte de rendement de l’orge en présence de soja.

En effet, avec deux rangs bouchés tous les deux rangs au semis (encadré), le relay-cropping divise par deux la densité de semis des orges par hectare (125 grains/m², contre 250 grains/m² en culture principale).

Le soja a été conduit de la même façon en relay-cropping qu’en culture principale, excepté pour le désherbage (aucun herbicide en relay-cropping sur le soja, seulement sur l’orge) ; dans les deux cas, le semis a eu lieu le 21 avril, avec le même semoir et la même variété. En culture dérobée, le soja a été semé le 22 juin par semis direct, aussitôt après la récolte de l’orge, avec une variété très précoce. Les cultures ont été irriguées selon les recommandations de Terres Inovia.

Une modification nécessaire des semoirs

En relay-cropping, afin de laisser la place au soja dans l’orge, il faut boucher des rangs au moment du semis de l’orge. Notre semoir à céréales ayant un espacement de 15 cm entre rangs, nous avons retenu un inter-rang de 60 cm pour le soja en semant deux rangs d’orge à 15 cm puis deux rangs vides.

Le semoir à soja a également dû être modifié car les rangs du semoir et les roues d’entraînement se trouvaient sur l’orge. Pour remédier à cela, les éléments ont été translatés et les roues d’entraînement positionnées sur la place de rang. Ainsi, avec une voie de tracteur de 180 cm et des roues étroites, le semis du soja dans l’orge s’est réalisé sans endommager l’orge.

Un stress hydrique plus important pour le soja

Avec une densité de semis réduite de moitié, le rendement de l’orge en relay-cropping est inférieur de seulement 17 % à celui de l’orge conduit en culture principale. En effet, le tallage de l’orge en relay-cropping est plus important du fait des rangs vides, ce qui compense en partie le peuplement limitant, grâce aux 30 % d’épis en plus au mètre linéaire. Le soja n’a pas été concurrentiel pour l’orge : aucune différence de rendement n’a été observée entre l’orge en relay-cropping avec et sans soja.

Par rapport à une double culture classique, on attendait du relay-cropping une récolte du soja plus précoce et un potentiel de rendement du soja supérieur. Cet essai ne permet pas de trancher. Le peuplement du soja en relay-cropping a été identique, voire supérieur au soja seul. Néanmoins la sécheresse du printemps a eu raison du soja : la réserve d’eau du sol a été complètement utilisée par l’orge, engendrant un stress hydrique pour l’orge et surtout pour le soja. La croissance du soja a été fortement pénalisée, et les températures très élevées de la mi-juin se sont ajoutées à ce stress. Le soja « classique » n’a pas été pénalisé puisque le couvert qui le précédait avait été détruit fin novembre.

Si la conduite du relay-cropping a été un succès, en évitant notamment tous les écueils mécaniques, les résultats du soja ne sont pas au rendez-vous à cause d’un stress hydrique trop impactant. Les résultats de l’orge sont, en revanche, très satisfaisants. Il est prévu de reconduire l’essai l’an prochain en veillant au meilleur contrôle de l’eau. À l’image des pratiques d’un groupe d’agriculteurs du Gers, une modalité sorgho sera ajoutée. Enfin, le bilan économique de ces différents systèmes de culture permettra de clarifier les choses.

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