Traitement des grains : les terres de diatomées pénalisent le PS

Utilisées en préventif contre les insectes lors de la préparation des locaux, les terres de diatomées sont aussi autorisées pour le traitement des grains. Mais ce second usage est freiné, car cette poudre minérale abaisse le poids spécifique des lots traités même s’ils passent au nettoyeur avant leur expédition.
La terre de diatomées pour protéger les grains de céréales

Désormais répandues comme traitements des locaux, les terres de diatomées offrent aux stockeurs un moyen de lutte préventif appréciable pour compléter la préparation de leurs locaux et réduire significativement les risques d’infestations des lots stockés . Cette poudre minérale est aussi autorisée pour le traitement des grains. Pourtant, elle est peu employée pour cet usage, notamment parce que son application fait baisser le poids spécifique du lot. Arvalis a mené un essai sur la plateforme expérimentale de Boigneville (91) pour déterminer s’il est possible de lever ce frein en nettoyant, avant expédition, un lot qui a été traité. Mais aucune des modalités appliquées n’a permis de retrouver le poids spécifique d’avant le traitement.

Une efficacité démontrée contre les insectes

Les terres de diatomées agissent par dessiccation de l’insecte : elles dégradent son enveloppe corporelle. Cette cuticule devient ainsi perméable aux échanges hydriques sous l’effet direct de la poudre. Or, l’insecte doit maintenir un certain équilibre hydrique pour survivre : il meurt dès qu’il perd 60 % de l’eau contenue dans son corps.

L’action des terres de diatomées est d’autant plus rapide que l’ambiance à laquelle est soumise l’insecte est chaude et sèche, l’efficacité optimale étant obtenue quand la température du stock dépasse 22°C et que la teneur en eau reste inférieure à 14 %. Ces conditions sont compatibles avec un traitement préventif avant l’ensilage des céréales moissonnées, ou un traitement curatif lorsque des infestations sont détectées par piégeage dans les grains durant le 1er palier de ventilation des grains. Le recours à cette solution reste possible durant le 2e palier de ventilation, si le stockeur rencontre des difficultés pour atteindre, dans son stock, la température de 12°C qui empêche le développement des infestations, et que la durée restante de stockage est longue.

Dans tous les cas, la poudre doit être incorporée de la manière la plus homogène possible dans le volume de grains. L’usage d’une poudreuse, sur un point du circuit de manutention le plus proche possible de la cellule de destination des grains (trémie, transporteur) limite la perte de produit.
Dans ces conditions optimales, une désinsectisation totale ou quasi-totale, selon l’espèce, est obtenue en deux semaines avec les terres de diatomées. De plus, le grain traité est protégé durablement des infestations : un essai a montré que ce traitement protège le stock durant les neuf mois qui ont suivi l’application (dans des conditions normales de conservation).

Plusieurs freins à l’application sur les grains

L’application de terres de diatomées entraîne une coloration blanchâtre notable des grains mais ne laisse aucune odeur particulière. Elle ne dégrade ni la qualité boulangère du blé tendre, ni la qualité des pâtes issues du blé dur traité, ni les propriétés de l’orge brassicole. Certains transformateurs sont parfois réticents à leur utilisation, principalement parce que la présence de poudre peut venir perturber leur process industriel.

Les freins limitant l’utilisation des poudres minérales directement sur les céréales stockées restent la difficulté d’application - l’opérateur devant manipuler une quantité élevée de poudre (1 à 2 kg de SilicoSec par tonne de grains) - et la baisse de poids spécifique (PS) engendrée par leur application. Estimée de 2 à 5 kg par hectolitre, cette dernière représente une perte économique sensible pour le stockeur.

Deux solutions ont jusque-là été proposées pour remédier à ces contraintes. La première est d’effectuer un traitement partiel, par couches dans le cas d’un traitement préventif des grains. Cette stratégie vise à empêcher la migration des insectes depuis les locaux ou les stocks voisins vers un lot a priori sain. Les couches inférieure et supérieure de ce dernier sont traitées, pour faire barrière. Les insectes qui traverseraient ces parties traitées mourront avant d’atteindre le cœur non traité du lot. Pour cela, il est recommandé de traiter des couches de grains d’au moins 50 cm, afin que le temps de contact entre l’insecte et la poudre soit suffisamment long.

La seconde solution envisagée est d’ôter les poudres minérales des grains en fin de période de stockage, en les passant au nettoyeur-séparateur avant expédition. Le stockeur pourrait ainsi espérer regagner tout ou partie du poids spécifique perdu par le traitement. Cette hypothèse a été évaluée par Arvalis dans un essai de nettoyage de blé tendre après traitement par SilicoSec.

Un produit de biocontrôle bien qualifiéLes terres de diatomées sont issues du broyage de dépôts fossiles de squelettes de micro-algues unicellulaires riches en silice naturelle. Il existe des gisements naturels dans plusieurs endroits du monde. Le seul produit homologué en France pour les traitements des locaux et/ou des céréales stockées est SilicoSec, désormais distribué par Andermatt France, filiale du fabricant Biofa. Ce produit est inscrit sur la liste des produits de biocontrôle et est autorisé en agriculture biologique. D’autres poudres minérales existent pour le traitement des locaux ou des grains mais elles n’ont pas le statut de produit phytopharmaceutique, n’ayant pas d’effet direct démontré sur l’insecte 3.

(3) Lire à ce sujet l’article « Les poudres minérales : comment protéger les grains avec une efficacité optimale » dans le n°467 de Perspectives Agricoles, juin 2019.

Le nettoyage ne suffit pas à faire remonter le PS des lots traités

Deux lots de blé tendre d’environ 330 kg ont été retenus pour l’essai, l’un ayant un poids spécifique de 80 kg/hL (lot A), l’autre de 70 kg/hL (lot B). PS, teneur en eau et teneur en matières minérales initiales sont mesurées. La moitié de chaque lot a été traitée, dans une mélangeuse, avec une dose de 2 kg/t de SilicoSec. L’autre moitié des lots, non traitée, servait de témoin. Six sacs d’environ 25 kg ont été constitués à partir des moitiés traitées/non traitées de chaque lot. Il y avait donc en tout 24 sacs. Le PS, la teneur en eau et la teneur en matières minérales ont été mesurés dans chacun des 24 sacs. Leurs contenus ont ensuite été nettoyés sur un nettoyeur-séparateur (Mini Petkus Rohr 200) équipé d’une grille d’émottage à trous ronds de 6 mm de diamètre et d’une grille de criblage à trous longs de 2x20 mm. Des échantillons ont été prélevés dans les grains nettoyés pour les mêmes mesures que précédemment. Les déchets générés par le nettoyage ont été pesés.

Les lots de l’essai réalisé par Arvalis ont été nettoyés dans un nettoyeur-séparateur Mini Petkus Rohr 200.

Le principal effet du traitement au SilicoSec est une baisse de 6,8 kg/hL du PS. Cette diminution est plus marquée pour les sacs issus du lot A, au PS de départ élevé, que pour ceux issus du lot B (figure1). La teneur en matières minérales a légèrement augmenté sous l’effet du traitement. En moyenne, avant traitement, le grain contenait 1,8 % de matières minérales pour passer, toujours en moyenne, à 2 % de matières minérales après traitement. Le traitement au SilicoSec n’a pas eu d’effet sur la teneur en eau.

POIDS SPÉCIFIQUE : toujours bas même après nettoyage

Le réglage du débit du nettoyeur-séparateur se fait en contrôlant l’ouverture de la trappe par laquelle le grain s’écoule. Deux niveaux d’ouverture de cette trappe ont été testés. À réglage identique, le débit des grains traités était en moyenne inférieur de 30 % à celui des grains non traités.

Les déchets générés par le nettoyage représentaient en moyenne 2,53 % de la masse initiale de grain. Les proportions de déchets aspirés varient beaucoup en fonction du lot et de la modalité (figure 2). Un test statistique (test de Student) a montré que la quantité de déchets aspirés est significativement plus importante pour un lot traité au SilicoSec. Le nettoyage n’a pas d’effet mesurable sur la teneur en matières minérales.

DÉCHETS D’ASPIRATION : la proportion varie selon le PS initial des lots

En moyenne, toutes modalités confondues, le nettoyage a fait remonter le PS de 0,7 kg/hL. Sa variation est avant tout liée au PS initial. Ainsi, le PS variait peu dans les sacs issus du lot A, alors que dans les sacs issus du lot B, le PS après nettoyage dépasse de 1,4 kg/hL celui mesuré avant le nettoyage. Cela ne suffit toutefois pas à revenir au PS initial des lots avant traitement.

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