Faut-il craindre les phytotoxicités ?
Pour les parcelles de céréales semées en conditions difficiles (mauvais recouvrement, semis à la volée, etc.), faut-il assurer le passage de prélevée ou bien attendre de meilleures conditions ? Y a-t-il un risque sur le rendement final de la parcelle ? Eléments de réponse avec un essai spécifique conduit sur orge d’hiver.
Afin de comparer une situation correctement semée (bien enterrée) à une situation plus difficile, quelques modalités ont été mises en place sur orge d’hiver, à Chouday (36) à l’automne 2019, un automne pluvieux.
Le semis a été réalisé sur un sol labouré, derrière lentille, le 11 octobre, avec la variété Etincel, en bonnes conditions. Pour trois modalités, l’essai a volontairement été semé avec une moindre pression sur les socs, aboutissant à la présence de grains en surface ou juste sous la surface. L’idée était de simuler une situation de semis difficile.
50 mm sont tombés durant la semaine suivant le semis, puis presque 30 mm après l’intervention de prélevée. Les conditions climatiques ainsi que les dates des applications de prélevée et postlevée sont précisées dans la figure 1.
Figure 1 : Conditions climatiques et dates d’intervention sur l’essai sélectivité-rendement orge d’hiver de Chouday (36) implanté à l’automne 2019
Des marquages de phytotoxicités parfois très importants
Les trois stratégies herbicides comparées sont assez classiques de ce que l’on retrouve en orge d’hiver :
- une postlevée stricte, avec Fosburi 0,6 l/ha ;
- un programme avec Trooper 2,5 l/ha en prélevée puis Défi 3 l/ha + Compil 0,2 l/ha en postlevée précoce ;
- un programme avec Défi 2,5 l/ha en prélevée puis Fosburi 0,5 l/ha + Tolurgan 3 l/ha en postlevée.
Les phytotoxicités observées sont « classiques » : les programmes conduisent à des marquages plus importants que la postlevée seule (figure 2). La phytotoxicité est par ailleurs plus marquée en situation de semis mal enterré, particulièrement avec la base Trooper (effet antigerminatif de la pendiméthaline sur les grains en surface). La différence visuelle est plus importante au 12 février 2020 (note 3) mais est minime au 29 avril 2020 (note 4). A noter que la campagne 2019-2020 a été marquée par du stress hydrique de fin de cycle qui a accentué ces phytotoxicités (note 4).
Figure 2 : Comparaison des phytotoxicités observées à 4 dates de notation, pour 3 modalités herbicides en fonction du type de semis (correct ou mal enterré) - Essai orge d’hiver de Chouday (36) 2019-2020
Des pertes de rendement significatives en semis mal enterré avec pendiméthaline
Au niveau des rendements, les écarts sont marqués entre un semis correct et un semis mal enterré pour le programme à base de pendiméthaline, de l’ordre de 10 q/ha (figure 3).
Lorsque le semis est correct, toutes les modalités herbicides obtiennent le même niveau de rendement. Malgré les marquages de phytotoxicités parfois importants, notamment pour les deux programmes étudiés, il n’y a pas d’impact sur le rendement en semis correct. Cela confirme beaucoup de données antérieures : les phytotoxicités précoces, qui se résorbent en sortie d’hiver, sont peu pénalisantes pour la culture.
En revanche, les écarts de rendement peuvent devenir significatifs dès lors que le semis est mal enterré. Si l’application solo de postlevée en semis mal enterré est peu impactée (rendement au niveau du témoin non traité), les programmes sont pénalisés, que ce soit avec de la pendiméthaline, du prosulfocarbe, du chlortoluron ou du flufénacet. Les pertes restent moins fortes sans pendiméthaline : elles sont de 5 q/ha (non significatifs) pour le programme Défi puis Fosburi + CTU. Elles montent à 10 q/ha (significatif) pour le programme Trooper puis Défi + Compil.
Figure 3 : Comparaison des rendements (en q/ha) de 3 modalités herbicides en fonction du type de semis (correct ou mal enterré) - Essai orge d’hiver de Chouday (36) 2019-2020
Les précautions à prendre en cas de semis difficiles
Le message général est de privilégier la qualité d’implantation plutôt que la date calendaire. Néanmoins, lorsqu’un semis a été « forcé » avec des grains nombreux en surface ou à peine recouverts, l’impact sur la culture peut être particulièrement important avec des bases pendiméthaline, et dans une moindre mesure avec du chlortoluron, prosulfocarbe et flufénacet. Dans ce cas, il convient donc de :
- si un seul passage est prévu à l’automne : se retenir pour faire son désherbage en prélevée et décaler ses applications en postlevée ;
- pour les parcelles nécessitant deux passages à l’automne : en prélevée, éviter les grosses associations et rester sur des mélanges simples sans pendimethaline.
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