Les résistances aux fongicides sont toujours présentes

Les résistances des souches de septoriose aux fongicides continuent de s’étendre. C’est ce que confirment les analyses réalisées par l’INRAE sur des échantillons de feuilles portant des symptômes de septoriose qui lui sont envoyées par les 24 partenaires régionaux du Réseau Performance.
Lorsque traiter devient nécessaire, il est essentiel d’alterner les modes d’action.

Lorsque traiter devient nécessaire, il est essentiel d’alterner les modes d’action.

En 2024, de nombreux échantillons de feuilles portant des symptômes de septoriose ont été collectés et envoyés au laboratoire INRAE BIOGER par les membres du Réseau Performance1. Ils ont permis d’étudier des populations de septoriose (Zymoseptoria tritici) provenant de 15 départements céréaliers. Au total, 268 populations ont pu être exploitées.

Différentes catégories de résistance

Ces analyses contribuent au suivi de l’évolution de la sensibilité des souches de septoriose vis à vis des fongicides. Elles sont classées en 4 catégories :

  • Les souches résistantes aux triazoles, elles-mêmes subdivisées en trois classes : les TriLR (faiblement résistantes aux triazoles), les TriMR (moyennement résistantes) et les TriHR (très résistantes à au moins un triazole). S’y ajoutent les MDR (Multi Drogues Résistantes), des souches résistantes à plusieurs familles de substances actives ;
  • Les souches résistantes aux SDHI (Succinate DésHydrogènase Inhibitors) : ces souches comptent quant à elles deux catégories : les CarR qui regroupent toutes les souches résistantes aux SDHI quels que soient leurs facteurs de résistance, et les CarHR, hautement résistantes aux SDHI ;
  • Les souches résistantes aux strobilurines (Qoi) : en France, elles sont toujours largement généralisées ;
  • Les souches sensibles aux IDM (Inhibiteur de DéMéthylation) : elles ne sont plus détectées depuis de nombreuses années, ce qui confirme la généralisation de la résistance aux IDM dans les populations fongiques françaises.
Prioriser les résistances à la rouille jaune et à la septoriose

Pour ralentir la progression des résistances des pathogènes aux fongicides, la note commune 2024 de l’Inrae - Anses - Arvalis, recommande en premier lieu de recourir aux variétés peu sensibles aux maladies, en priorisant la résistance aux maladies ayant le plus d’impact sur le rendement ou sur la qualité sanitaire comme les variétés résistantes à la fois à la rouille jaune et à la septoriose. Les experts soulignent l’intérêt de diversifier les variétés à l’échelle d’une exploitation, de la microrégion et d’une année sur l’autre pour conserver la durabilité des résistances génétiques et opposer des barrières à la dispersion des résistances des pathogènes aux fongicides. La note commune de 2025 sera diffusée fin janvier par les canaux internet habituels.

Une résistance bien installée, surtout au Nord

Les souches TriLR sont maintenant anecdotiques et représentent en moyenne moins de 1 % de la population échantillonnée. En 2024, les souches TriMR représentaient quant à elles en moyenne 6 % de la population, contre 7 % en 2023. La fréquence moyenne des souches TriHR de 2024 est similaire à celle de 2023 (64 % vs 63 %) et ces souches sont maintenant généralisées sur le territoire puisque leur présence est détectée dans la totalité des échantillons. Les souches MDR sont stables, et ont été détectées en 2024 dans 94 % des échantillons, à la fréquence moyenne de 30 % (29 % en 2023). Les fortes fréquences moyennes de ces 2 catégories sont observées en particulier dans la grande moitié du Nord de la France.

En 2024, la proportion de populations présentant des souches résistantes aux SDHI est restée stable (occurrence 93 % en 2024, comme en 2023). La fréquence moyenne de souches CarR atteint 41 % (comme en 2023) et inclut potentiellement une grande diversité de mutations. La fréquence moyenne des souches CarHR est également stable, et atteint 19 % (21 % en 2023). À noter que les Hauts-de-France observent une progression des souches CarR.

Il est important de rappeler que les SDHI sélectionnent aussi des souches de type MDR et qu’il est souhaitable d’anticiper le risque de résistance multiple CarR + MDR.

Aucune souche résistante spécifiquement au fenpicoxamide (QiI) n’a été détectée en 2024.

La situation en 2024 vis-à-vis de la résistance aux IDM et aux SDHI est stable par rapport à 2023.

Sur 12 essais du Réseau Performance et Double Performance, situés majoritairement dans les Hauts-de-France (avec dans les témoins, des populations de phénotypes CarR supérieures à 35 % et de CarHR supérieures à 10 %), les efficacités sont d’autant plus limitées pour Elatus Era 0,75 l/ha et Revystar XL 0,75 l/ha que la fréquence des souches résistantes CarR et CarHR est élevée (figure 1). Pour un même niveau de résistance, il subsiste une variabilité d’efficacité qui s’explique par un positionnement en curatif. Dans ces situations, à forte proportion de souches résistantes, le fenpicoxamide (Univoq 1 l/ha), non concerné par la résistance, témoigne d’une efficacité supérieure sur la septoriose. Elle se traduit par un gain significatif de 5 q/ha par rapport à la référence Revystar XL 0,75  l/ha et de 6,9 q/ha par rapport à Elatus Era 0,75 l/ha.

SDHI+IDM : dans le contexte de 2024, l’efficacité des solutions actuelles est mise à mal
Figure 1 >>> SDHI+IDM : dans le contexte de 2024, l’efficacité des solutions actuelles est mise à mal. Efficacités et rendements obtenus pour quatre solutions fongicides testées dans 12 situations avec plus de 35 % de souches de septoriose CarR (résistantes aux SDHI). Prix du blé 19 €/q. Réseau Performance 2024. 

Renforcer les bonnes pratiques

La gestion responsable des fongicides doit se poursuivre pour limiter la progression des souches résistantes. En priorité, il ne faut intervenir que si c’est nécessaire voire indispensable, c’est pourquoi, l’utilisation d’un OAD est fortement conseillée. Lorsque traiter devient obligatoire, il est essentiel d’alterner les modes d’action avec, notamment, une seule application par programme de SDHI, de strobilurine, de prothioconazole, de fenpicoxamide. Il faut aussi éviter d’utiliser deux fois la même matière active de type triazole. Enfin, il est recommandé d’utiliser, si possible, un multisite comme le soufre ou le folpel au T1 et au T2 dans les régions du Nord de la France où la résistance est la plus implantée.

(1) 24 partenaires régionaux participent au réseau Performance : ADAMA, AGORA, ARVALIS, BASF, BAYER, CA 02, CA 03, CA 80, CA IdF, CERESIA, CORTEVA, CRA-W, De SANGOSSE, NORD NéGOCE, NORIAP, SETA de Bapaume, SIPCAM, STAPHYT, SUMITOMO, SYNGENTA, TERNOVEO, UNEAL, UPL, Val de Gascogne, VIVESCIA.

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