Projets labellisés « bas-carbone » : les bases du financement des exploitations sont posées
La méthode Label Bas-Carbone « Grandes cultures » a été soumise au ministère de la Transition écologique en décembre 2020 et approuvée durant l’été 2021.
Le Label Bas-Carbone est un moyen, pour les collectivités, les entreprises et les citoyens, de financer des projets locaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre, sur une base volontaire, par exemple pour compenser leurs propres émissions ou contribuer à la neutralité carbone. Pour les agricultrices et les agriculteurs, ce cadre ouvre la voie à une nouvelle source de rémunération, en faisant valoir financièrement les efforts engagés sur les exploitations agricoles pour atténuer le changement climatique.
Officiellement lancé le 23 avril 2019, le Label Bas-Carbone est le premier système de labellisation de projets de compensation carbone volontaire français. Initié et encadré par le ministère de la Transition écologique, il a été élaboré avec le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation. Son objectif est de contribuer à l’atteinte de la neutralité carbone de la France en 2050(1).
Afin de valoriser économiquement les émissions de gaz à effet de serre (GES) évitées, ainsi que les suppléments de carbone stockés dans le sol, il est nécessaire de les quantifier de manière fiable et transparente. Le label crée ainsi un cadre reconnaissant des méthodes qui ciblent un secteur ou des pratiques sectorielles identifiées. Une fois approuvées par l’État, ces méthodes peuvent être déployées dans des projets locaux, individuels ou collectifs, labellisés par l’autorité compétente après avoir examiné leur conformité aux méthodes approuvées. Les réductions d’émissions du projet «
Pour l’agriculture, trois méthodes sont déjà mobilisables depuis 2020. Elles concernent les élevages bovins (CarbonAgri), les haies et les plantations de vergers. Le secteur des grandes cultures est très attendu car il constitue un important gisement de crédits carbone, à la fois par la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre et par le stockage de carbone dans les sols (effet «
La quantification des réductions d’émissions de gaz à effet de serre fait appel à l’utilisation de modèles parfois complexes et mobilise de nombreuses références. La création d’outils pour automatiser cette mise en œuvre est donc indispensable. Ces outils devront être certifiés conformes au cahier des charges décrits dans la méthode Label Bas Carbone «
La méthode repose sur un consensus technique
À la demande des associations de producteurs de blé
Durant toute l’année 2020, ce consortium a préparé la rédaction de la méthode «
La méthode LBC « Grandes Cultures » décrit l’ensemble des leviers de réduction des émissions de GES pouvant être mis en œuvre par les productrices et les producteurs, ainsi que les pratiques visant à stocker davantage de carbone dans les sols(3). Elle s’articule avec les méthodes déjà approuvées (CarbonAgri, méthode «
Parmi les leviers activables sur les exploitations se trouvent la réduction des doses d’engrais via l’augmentation des surfaces de légumineuses ou une meilleure efficience, la consommation de carburant ou encore les apports de matière organique.
Deux volets d’actions : moins d’émissions et plus de séquestration
Pour réduire les sources d’émissions de GES sur les exploitations, les leviers activables concernent surtout la gestion de la nutrition azotée des cultures (choix de la forme des engrais, réduction des doses via une meilleure efficience des apports ou l’insertion de légumineuses...) et la consommation de carburant (travail du sol, énergie nécessaire au pompage de l’eau d’irrigation...). Pour augmenter la séquestration des GES par stockage de carbone dans les sols (ou obtenir un moindre déstockage), les leviers visent l’accroissement du retour de carbone au sol : couverts végétaux, résidus de cultures, apport de produits résiduaires, insertion de prairies temporaires… L’amont de l’exploitation est pris en compte à travers l’effet des changements de pratiques sur les achats d’engrais et de combustibles fossiles. L’aval est également concerné par l’effet des pratiques sur le séchage au niveau des organismes stockeurs (figure 1).
Figure 1 : Réductions d’émissions (RE) couvertes par la méthode du Label Bas-Carbone « Grandes Cultures ».
Par ailleurs, si les leviers mobilisés dans les projets LBC apportent d’autres services que ceux liés à l’atténuation du changement climatique, il peut être intéressant de les faire valoir, notamment pour négocier le prix des crédits carbone avec le financeur. La méthode «
Un engagement de cinq ans renouvelable
Le porteur du projet devra choisir, pour chacune des exploitations impliquées, un scénario de référence. Dans le cas d’un scénario spécifique, les pratiques des trois années précédant le lancement du projet constituent la référence. Dans le cas d’un scénario générique, ce sont les pratiques moyennes départementales ou, à défaut, régionales qui servent de point de comparaison.
Après avoir identifié les leviers mis en œuvre pendant la durée du projet, une estimation a priori des réductions d’émissions (RE) sera réalisée. Ces RE sont modulées selon les choix méthodologiques (sources des données, risque de non-permanence du stockage de carbone dans les sols...) et additionnées, à l’hectare, sur toute la durée du projet. Une fois le projet labellisé par les autorités, les exploitations devront enregistrer annuellement toutes les données relatives aux pratiques impliquées, afin de réévaluer, en fin de projet, les réductions d’émissions. Les modalités de financement pourront varier selon le projet. Au bout de cinq ans, un audit de vérification devra être réalisé par un organisme agréé. Il débouchera sur la reconnaissance par les autorités des crédits carbone associés aux RE (figure 2). Les projets labellisés pourront être renouvelés sans limite à condition de remplir à nouveau les exigences de la méthode.
Figure 2 : Les étapes clés de la vie d’un projet Label Bas-Carbone (LBC). RE : réductions d’émissions.
(1) Voir l’article « Objectif neutralité carbone : un défi incontournable pour les grandes cultures » de ce même numéro.
(2) INRAE : institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement ; ADEME : agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie ; I4CE : institut de l’économie pour le climat.
(3) Voir l’article « Stockage du carbone & réduction des émissions de GES : quelles sont les pratiques les plus efficaces ? » de ce même numéro.
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